Voilà synthétisée ici une présentation d’albums à des professionnels de l’enfance que j’ai faite lors du festival Partages de Lectures organisé par le département du Val de Marne au printemps 2022. Y ont été partagées différentes sélections avec, pour ma part, le sujet passionnant de l’album s’adressant à des enfants qui commencent à lire, qui lisent déjà, voire à des adolescents.

À titre introductif, revenons sur la notion même d’album qui interroge d’autant plus par ce sujet. De prime abord, en évoquant l’album, l’on pense à un public visé d’enfants jeunes, qui ne savent souvent pas encore lire alors que le sujet ici vise plutôt un public lecteur, ou au moins apprenti lecteur. L’album est souvent vu comme un medium de support à la lecture, lien entre l’adulte lecteur et l’enfant écoutant et regardant. Mais, même si c’est moins évident à première vue, la forme de l’album peut aussi concerner des enfants plus grands.

Afin de circonscrire la sélection, revenons à une rapide définition de l’album. Il est couramment entendu comme un livre supposant un agencement entre texte et images pour arriver au sens du récit. La structure première de l’album est la double-page et sa charnière, la reliure. Cela donne lieu à un enchaînement articulé de pages en pages selon différentes formes de dialogues entre texte et images. Pour une définition plus étayée, je vous renvoie aux écrits de Sophie Van Der Linden sur le sujet et notamment à son livre Album(s) aux éditions Actes Sud junior.

Par opposition, certains livres peuvent bien correspondre aux tranches d’âge visées mais ne sont pas des albums : les textes illustrés où le texte se suffit à lui-même quant au sens du récit (contes, classiques illustrés, romans illustrés) ou la bande dessinée caractérisée par sa séquentialisation, organisation par planches, bandes et cases plus ou moins régulières qui découpent l’action. L’on peut toutefois remarquer de plus en plus de glissements entre ces catégories dont le principe même est d’évoluer.

Au-delà de ces principes posés, je tenais à préciser que, si je peux parler ici de classiques, ou du moins de livres pas forcément récents, je ne parlerai pas des incontournables que beaucoup connaissent déjà, comme par exemple Claude Ponti que l’on peut redécouvrir avec délice en commençant à lire seul. Même si je suis une libraire de fonds, mon but ici est de parler de livres et d’auteurs parfois moins connus, de partager mes découvertes et enthousiasmes dans ce champs de la littérature jeunesse, d’albums que j’aime conseiller en librairie, que j’aime lire avec et à des enfants plus ou moins grands, dont j’aime le propos et le graphisme. Vous en connaîtrez sûrement certains, tous ne sont pas confidentiels, j’espère pas tous et j’espère vous donner envie de les découvrir.

  1. L’album quand on commence à lire :

Voilà un âge charnière, autour de six ans où la lecture est débutante, parfois hésitante. Il peut y avoir chez certains enfants un rejet de la lecture seul et un attachement à la lecture par un adulte ou inversement, un rejet de la lecture partagée. L’on peut aller vers des albums plus denses et complexes que pour les plus jeunes enfants malgré certaines difficultés à la lecture fluide. En effet, la lecture seul de textes plus simples peut frustrer des enfants à cet âge-là : ce n’est pas parce que l’on commence à lire que l’on a envie de lire des livres adaptés dans leurs narrations à des enfants plus jeunes. Il peut toutefois être important de ne pas abandonner la lecture partagée même si l’enfant commence à savoir lire : tant pour l’inciter à lire seul que juste pour le moment de partage de la lecture.

1.1. Les premières lectures :

En parlant de premières lectures, l’on pense tout de suite à des petits fascicules de lecture aidée parfois à l’esprit presque parascolaire. Mais il y a des albums parfaits pour commencer à les déguster doucement en lecture seul ou accompagné selon les moments : des histoires courtes mais pas simplistes, des jeux sur les mots que l’on redécouvre autrement par la lecture. Cela peut donner aux enfants bien plus envie que des livres uniquement faits pour apprendre à lire, l’enfant y trouvant également son compte avec l’histoire. Les illustrations alors rassurent autant qu’elles aident et accompagnent la lecture en mettant sur la voie du texte ou en créant un décalage avec lui.

Vézovèle Tüpoleck de Delphine Perret aux éditions Les Fourmis Rouges :

Voilà un livre d’un petit format pas trop impressionnant regroupant trois courtes histoires autour de ce petit extra-terrestre qui peut prendre n’importe quelle forme et couleur et qui est passionné par les humains dont il rapporte des souvenirs étonnants de chacun de ses voyages sur Terre. Il y a là tout l’art de Delphine Perret de raconter les petites choses. L’humour vient du décalage créé dans le simple fait que le personnage principal soit un extra-terrestre : les petites choses sont étonnantes, drôles et fantaisistes. Tout cela est très amusant à découvrir progressivement à la lecture. Le trait est fin et rehaussé de touches de couleurs à l’aquarelle donnant une mise en page aérée mettant sur le chemin de la lecture sans complexes, seul ou accompagné.

Plus d’informations sur ce livre par ici.

J’étais au pays de Ava & Ève d’Anne-Margot Ramstein aux éditions Albin Michel Jeunesse (collection Trapèze) :

Voilà un très bel album où un personnage visite en compagnie de deux sœurs jumelles l’île des palindromes où absolument tout fonctionne dans les deux sens, au-delà même de la lecture. Il écrit alors des cartes postales à sa mère pour lui raconter ce voyage. Le dispositif de la correspondance et du récit de voyage est poussé jusqu’à l’usage d’une typographie scripte intéressante à la lecture comme l’écriture apprise à l’école. L’on navigue ici vers tant de jeux sur les mots savoureux où l’on se plaît à débusquer avec les enfants toute la finesse et la malice de l’autrice. Les palindromes sont présents ici jusque dans les illustrations : l’île en elle-même est entière symétrique. Les illustrations, saisissantes dans leurs dégradés aux crayons de couleurs, ajoutent au sens du récit par des détails à débusquer pour saisir toute la symétrie de l’univers.

Plus d’informations sur ce livre par ici.

À lire aussi : Hulul d’Arnold Lobel aux éditions L’École des loisirs ; Le Chat chapeauté du Dr Seuss aux éditions Le Nouvel Attila ; Confettis d’Adèle Jolivard aux éditions Les Fourmis rouges ; Chnourka de Gaya Wisniewski aux éditions MeMo.

1.2. Les récits d’enfance et d’amitié :

Par des récits de leur quotidien, la représentation de l’enfance pour les enfants peut être très importante. À cet âge, on se lie d’amitié, on se fâche, on va à l’école, on part en vacances, on cherche à se détacher un peu des parents…

Louise ou l’enfance de Bigoudi de Delphine Perret et Sébastien Mourrain aux éditions Les Fourmis rouges :

Ici, Louise doit déménager dans une grande ville où elle est un peu perdue et déçue jusqu’à sa rencontre avec celle qui deviendra sa meilleure amie, Ella. Ensemble, elles rient, découvrent la ville, se chamaillent… De ces souvenirs d’enfance se dégagent autant d’humour que de tendresse. Le tout est aussi fin et malicieux que les illustrations apportant un aspect suranné d’enfance éternelle : l’histoire se passe a priori à New-York dans les années 50 mais cela pourrait être aujourd’hui (hormis quelques petits détails délicieux). L’on est à l’âge où peuvent se développer de grandes amitiés, où l’on se sent grandir, où l’on peut chercher une certaines indépendance et une vie hors de la famille. D’où l’importance de l’identification à certains héros de livres.

Plus d’informations sur ce livre par ici.

La Belle Équipée de Sophie Vissière aux éditions hélium :

Voilà trois enfants en colonie de vacances qui, punis, se retrouvent privés de sortie en canoë : ils vont alors décider de construire un bateau, petit voilier de fortune pour en faire le théâtre de grandes aventures. Ils se répartissent les tâches dans des scènes que l’on va suivre en parallèle grâce à un code couleur ingénieux mis en place par l’autrice : chaque enfant est représenté par une pastille de couleur. Le livre s’avère très ludique, entre le récit d’aventure et le livre-jeu avec plusieurs niveaux de lecture et plusieurs façons de le lire, de façon linéaire ou en suivant l’un ou l’autre des personnages. Un réel intérêt se développe pour l’enfant actif dans la lecture ou pouvant participer par ses choix à celle de l’adulte. D’autant plus par le sujet du livre reprenant les joies des colonies de vacances, des groupes d’enfants, de l’été et des grandes aventures que l’on projette.

Plus d’informations sur ce livre par ici.

Ma chronique sur ce livre par là.

À lire aussi : Une Belle Journée d’Anne Laval aux éditions du Rouergue ; La Colonie de vacances de Fanny Dreyer aux éditions Albin Michel jeunesse (dont je parle plus longuement par ici).

1.3. Les grandes aventures fantastiques :

L’on est à un âge où l’on se plonge avec délice dans des aventures à rebondissements faites d’humour, de fantaisie, voire de fantastique où se mêlent réécriture de contes et références diverses. Les enfants ne sont alors pas forcément capables de lire ces livres seuls mais sont bien à même de les apprécier dans leur densité et leur mise en place.

Le Roi de la Lune de Bérengère Cournut et Donatien Mary aux éditions 2024 :

Où une petite fille est enlevée par le Roi de la Lune et découvre dans son royaume spatial une machination orchestrée avec l’aide de plein de petits personnages pour voler tous les jouets des enfants sur terre. La narration est truffée de rebondissements, entre absurde et grande fantaisie. L’on va sur la Lune en fusée, l’on repasse sur Terre, l’on retourne sur la Lune, il y a des dinosaures, un bateau, un train électrique… C’est réjouissant pour petits et grands ! Le texte est drôle, malicieux et très fin et le travail des illustrations est très minutieux dans les détails du fonctionnement machiavélique que l’on débusque sur certaines pages.

Plus d’informations sur ce livre par ici.

Polly et les trois chiens d’Adèle Verlinden aux éditions Les Fourmis rouges :

Voilà une princesse, régnant sur un royaume merveilleux où les chiens et les humains vivent en bonne entente, jusqu’à la disparition de tous les chiens du royaume ! Elle va les retrouver prisonniers d’une affreuse monstresse et les libérera grâce à trois chiens géants et un briquet magique. L’autrice développe là une adaptation très libre du conte Le Briquet d’Andersen par une confrontation entre l’univers du conte (que l’on connaisse Le Briquet ou que l’on n’en saisisse que les références et celles à d’autres contes et à l’univers du merveilleux) et celui propre à l’autrice avec des références et illustrations fantaisistes aux peintures éclatantes. Il y a là tant d’humour, de décalage que de démesure dans cette grande aventure faite de rebondissements et de fantaisie.

Plus d’informations sur ce livre par ici.

Ma chronique sur ce livre par là.

À lire aussi : Madame le Lapin blanc de Gilles Bachelet aux éditions du Seuil jeunesse ; Laïka de Camille Louzon aux éditions Magnani (dont je parle plus longuement par ici) ; Le Talisman du loup de Myriam Dahman, Nicolas Digard & Júlia Sardà aux éditions Gallimard jeunesse.

2. L’album quand on lit déjà :

L’âge de la lecture fluide dépend des enfants mais peut venir vers 7 ou 8 ans. Si l’on recherche plus de complexité dans les histoires, les enfants restent souvent encore attirés par les albums, tant pour se rassurer par les illustrations que pour en apprécier tout l’art. Ce n’est en effet pas parce que l’on sait bien lire que l’on n’a plus droit à l’album : la narration y est très intéressante et peut être fouillée, cela n’excluant alors pas d’autres types de lectures (romans ou bandes dessinées notamment).

2.1. Les albums denses :

L’on peut prendre plaisir à lire avec des enfants plus grands, qui savent lire par eux-mêmes, des livres plus denses en texte, voire chapitrés, aux illustrations et univers particulièrement intéressants et fouillés. La lecture peut être suivie, en plusieurs fois, comme un rituel partagé. L’on peut même parfois lire ensemble des romans, mais les albums apportent ce travail sur l’illustration qui accroche l’œil de l’enfant écoutant et enrichit ou apporte un autre éclairage à l’histoire qu’il entend.

Les Contes de Petit Duc de Jean-Baptiste Labrune et Jérémie Fischer aux éditions Magnani :

Où Chèms, un grand sage, s’ennuie et se questionne sur tout et rien et rencontre en forêt Petit Duc, un hibou qui prétend détenir tout le savoir et pouvoir répondre à toutes les questions. Il l’interroge alors sur tant de questions existentielles : Pourquoi la nuit est-elle noire ? Pourquoi la lune brille-t-elle ? Pourquoi rêve-t-on ? Pourquoi vieillit-on ? Toutes ces questions trouveront leurs réponses par des paraboles, sortes de contes ou récits des origines et de la création du monde par le biais des aventures d’un géant, Akétopiou. L’écriture est ici proche du conte philosophique ou cosmogonique. L’histoire se développe avec beaucoup de sous-texte et de réflexions possibles sur le moment de la lecture ou par après. Les illustrations sont saisissantes avec des aplats de couleurs vives se fondant parfois avec le texte plus ou moins dense selon les pages dans un rapport texte / images très intéressant dans ses évolutions.

Plus d’informations sur ce livre par ici.

Les Moomins, le dangereux voyage de Tove Jansson aux éditions Cambourakis :

Les Moomins, ce sont mes classiques à moi, qui ne sont finalement pas toujours aussi connus en France qu’ils ne le méritent. Voilà ici une traduction du suédois en français pour la première fois en 2018 d’un livre paru à l’origine en 1977 en Finlance. Susanna, une petite fille, y part à la recherche de son chat et se trouve embarquée dans une grande aventure semée d’embûches de toutes sortes aux côtés de créatures étranges jusqu’à rejoindre la terre des Moomins. Ce périlleux voyage dans un univers entre rêve et réalité est fait de rebondissements rocambolesques passant par la forêt, un volcan, une montgolfière au-dessus de la mer… Tout cela tient en haleine et satisfait l’envie de péripéties de nombre d’enfants. Cet univers fantastique tantôt effrayant tantôt joyeux avec les Moomins, petits trolls de la montagne bien amusants, est renforcé par les illustrations tirées de grandes peintures de Tove Jansson. Le texte, rimé et très musical, est très intéressant à lire à voix haute à des enfants.

Plus d’informations sur ce livre par ici.

À lire aussi : Le Bandit au colt d’or de Simon Roussin aux éditions Magnani ; Lotta la filoute d’Astrid Lindgren & Beatrice Alemagna aux éditions Versant Sud ; La Fabuleuse Histoire de la poire géante de Jacob Martin Strid aux éditions Pocket jeunesse ; Le Pays des Chintiens, La Grande Forêt d’Anne Brouillard aux éditions L’école des loisirs.

2.2. Les albums concepts :

Certains livres bien adaptés à cet âge jouent sur les mots, sur la forme du livre, sur les illustrations. L’enfant peut comprendre par lui-même le jeu, même si la lecture collective y est toujours bien adaptée. Ce sont des livres malins qui donnent des envies de médiation, d’ateliers avec les enfants pour en continuer l’univers.

Il était une forme de Gazhole et Cruschiform aux éditions Maison Georges :

Voilà, dans un royaume où il est de bon ton d’être anguleux, la parfaite princesse triangle isocèle qui s’éprend d’un prétendant bien plus courbe que souhaité par ses parents et la cour… Les auteurs suivent la trame classique du conte de fées avec ses personnages et intrigues présents dans l’inconscient collectif tout en confrontant cela à l’usage très moderne de formes géométriques pour représenter tous les personnages. Ce jeu narratif et graphique se retrouve au service d’une histoire qui fonctionne parfaitement. Le livre est aussi malin, ingénieux et virtuose que très beau et graphique.

Plus d’informations sur ce livre par ici.

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Le Secret très secret du Maître du Secret de Vincent Pianina aux éditions Thierry Magnier :

Dans ce livre, le personnage principal de l’histoire est le lecteur (lisant ou écoutant, selon), coiffé d’un heaume de chevalier et s’apprêtant à vivre une semaine en colonie de vacances peu réjouissante dans la Vallée du Secret. Mais, au détour d’une brochure touristique évoquant le Maître du Secret, il va partir à sa recherche. Tout est rédigé à la seconde personne du singulier, impliquant totalement l’enfant lecteur. Plus qu’un réel livre-jeu, il y a ici du jeu sur le livre et sur le jeu en lui-même. L’on se retrouve entre quête absurde et parodie de livre dont vous êtes le héros tout en gardant un réel suspens sur le secret en question. Est développé un univers médiéval et fantasy très riche et référencé qui s’apprécie dans tous ses détails et toute sa construction. Beaucoup d’humour se dégage des embûches, revers et retournements de situation absurdes que l’on partage et apprécie avec des enfants plus grands, entre décalage et références communes.

Plus d’informations sur ce livre par ici.

Ma chronique sur ce livre par là.

À lire aussi : Retour vers l’Antiquité de Delphine Chedru aux éditions hélium ; Mythes au carré de Loïc Gaume aux éditions Thierry Magnier.

2.3. L’album vers le documentaire :

L’on remarque souvent chez les enfants vers cet âge une grande curiosité technique sur des thèmes variés. Les albums documentaires permettent une réelle narration tout en expliquant un point technique partie de cette narration. Ils peuvent amener à beaucoup de partage et de médiation autour des livres en eux-mêmes et des thématiques abordées.

La Lithographe de Gaby Bazin aux éditions MeMo :

Dans ce livre est montré un atelier de lithographie où l’on suit une professionnelle de ce procédé d’impression dans son travail avec son histoire, ses techniques, ses outils et expérimentations. L’on y trouve tant une explicitation de cette technique fascinante qu’un portrait de femme et de professionnelle. L’intérêt de l’album réside également dans l’objet livre en lui-même. Il a été imprimé en offset en tons directs, ce qui offre un résultat proche de la lithographie : les tests réalisés par la lithographe sont visibles par les lecteurs pour en comprendre le processus.

Plus d’informations sur ce livre par ici.

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Yahho Japon ! d’Éva Offredo aux éditions Maison Georges :

L’autrice propose ici une découverte du Japon par le portrait de huit femmes fictives aux métiers bien particuliers et liés à leurs traditions et modes de vie : sumo, peintre cervoliste ou ensableuse. L’on est entre fiction, documentaire, carnet de voyage, portrait ou leçon de choses. Est dressé un portrait en creux du Japon, de sa société et de sa culture par une forme d’extraordinaire du quotidien, mais d’un quotidien qui nous est étranger. Cela est renforcé par les illustrations d’Éva Offredo, entre le schématique, le pop, le traditionnel, les détails et le jeu sur les gammes de couleurs, une par portrait. Cela peut s’avérer très intéressant à un âge où le Japon fascine nombre d’enfants par le biais du manga livre ou animé.

Plus d’informations sur ce livre par ici.

Ma chronique sur ce livre par là.

À lire aussi : Joan Procter de Patricia Valdez & Felicita Sala aux éditions Cambourakis ; L’hôpital des dinosaures de Hye-Won Kyung aux éditions Versant Sud ; Au Bois de Charline Collette aux éditions Les Fourmis rouges.

3. L’album pour les plus grands :

Parce qu’il n’y a pas d’âge pour apprécier l’art narratif de lier texte et images par l’album, il peut aussi y avoir des albums pour pré-adolescents ou adolescents. Ce n’est clairement pas les plus répandus tant l’album est a priori vu pour les petits enfants, mais l’on en remarque de plus en plus récemment. À noter qu’il peut aussi y avoir différentes façons de lire un même album selon son âge : plusieurs niveaux de lectures peuvent être possibles sans que les différents lectorats y perdent en intérêt. Peuvent alors s’avérer intéressants à l’adolescence des albums que l’on pourrait de prime abord destiner à des plus jeunes enfants.

3.1. Les récits d’apprentissage :

L’on arrive à un âge de transition, de passage entre l’enfance et l’âge adulte pour lequel sont publiés nombre de romans d’apprentissage ou d’initiation. Peuvent être remarqués de plus en plus d’albums sur ce sujet, à découvrir seul ou en lecture partagée pouvant donner lieu à discussion.

L’oiseau en moi vole où il veut de Sara Lundberg aux éditions La Partie :

Voilà un portrait de la peintre Berta Hansson dans son adolescence dans une ferme en Suède au début du XXe siècle. Est dépeinte autant une vie d’adolescente que de découvertes : la jeune fille est confrontée à sa différence, aux autres, à sa famille, au deuil de sa mère. Prend forme un récit d’émancipation de cette jeune fille qui finira, par acharnement, à pouvoir continuer ses études et à peindre, plutôt qu’à aider à la ferme et se marier. Malgré une distance donnée par l’époque abordée, de réelles résonances féministes se dégagent de cet album très intéressant et actuel. Le texte est sobre mais dégage un vrai propos à l’adolescence où il peut y avoir un besoin d’identification. Les illustrations à la peinture apportent beaucoup de relief au récit et donnent à ressentir la sensation de la peinture pour Berta, sa nécessité.

Plus d’informations sur ce livre par ici.

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À Travers de Tom Haugomat aux éditions Thierry Magnier :

L’auteur dresse le portrait par ce qu’il vit et voit à chaque étape de sa vie d’un jeune homme qui rêve de devenir astronaute. Il y a là du récit d’apprentissage, de ce que l’on fait de ses rêves d’enfant avec beaucoup de symbolique sur la vie et son déroulé en sous-texte. De sa naissance à sa mort, toutes les étapes de sa vie sont développées par double-page sous forme de jeu de regard entre ce qu’il vit en parallèle à ce qu’il voit à travers une fenêtre, un écran, un trou de serrure… Le livre est presque sans texte : seules des dates et lieux en explicitent l’évolution. Une narration s’en détache tout de même clairement. Il n’y a pas nécessairement besoin de longs textes pour s’adresser aux plus grands ! Cela peut résonner à l’adolescence, âge des premiers choix et questionnements. Ce livre est alors aussi intéressant à développer par son concept, ses illustrations que par le parcours du personnage.

Plus d’informations sur ce livre par ici.

3.2. Les récits d’aventure à portée philosophique :

En parallèle et parfois coordonnés aux récits d’apprentissage, les récits d’aventure développés sont assez fréquents pour les plus grands. Les textes sont souvent plus denses, les aventures construites et complexes. Cela peut être accompagné d’un sous-texte philosophique, d’un questionnement sur la vie, son sens, questionnement fréquent à l’adolescence.

Le Berger et l’Assassin d’Henri Meunier et Régis Lejonc aux éditions Little Urban :

Voilà l’histoire d’un berger qui, dans ses alpages, recueille, soigne et cache un assassin recherché par une milice. Ils vont devoir tenter de gravir la montagne pour se réfugier de l’autre côté. Les textes denses, sobres et pudiques reprennent principalement des dialogues ou impressions entre les deux personnages, tout fonctionnant par ellipse. En ressort une fable humaniste sur fond du fascisme que l’on devine autour des notions d’entraide, de principes. Les images impressionnantes et mises en valeur par le très grand format du livre se placent en parallèle du texte sans l’illustrer. N’y est pas montré ce qui s’y passe mais ce que voient les personnages, ce qu’ils projettent face à ces montagnes arides, impressionnantes et merveilleuses. Ce livre n’en est que plus intense et bouleversant.

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L’invention des dimanches de Gwenaëlle Abolivier et Marie Détrée aux éditions du Rouergue :

Voilà relatée la vie de marins à bord d’un bateau parti pour un long voyage d’environ deux mois. Le rythme en est lent et lancinant pour une aventure, faite ici de routine et de répétitions. Les marins se retrouvent entre ennui et visuels saisissants. Est montrée l’élasticité du temps dans ce grand voyage ; le temps passe bien différemment dans ce contexte que sur terre. Les marins décident alors de fixer un dimanche (qui pourrait être un mardi en vrai), pour tenter de dominer ce temps. La réflexion sur le temps et sur l’aventure est intéressante et renforcée par les illustrations de paysages maritimes saisissantes faites de trames aux feutres.

Plus d’informations sur ce livre par ici.

3.3. Les albums inclassables :

Ces albums pourraient peut-être être rangés dans d’autres catégories d’âge ou de contenu mais sont intéressants en cela que c’est par la médiation de l’adulte qu’ils vont trouver leur public pouvant varier.

Adieu Blanche Neige de Beatrice Alemagna aux éditions La Partie :

En se réappropriant le conte très connu de Blanche Neige des frères Grimm, l’autrice dresse une sorte de confession à la première personne de la reine vengeresse. Le texte, d’où ressort une grande souffrance, une jalousie maladie, est renforcé par les illustrations de peintures en pleine page sombres, torturées, profondes et très déliées et lâchées. L’on oscille entre tragique et poétique dans cette forme de catharsis de la reine, aussi excessive que l’on peut l’être à l’adolescence. Ce livre est alors aussi intéressant dans la réappropriation du conte que dans l’expression des sentiments par le texte et les illustrations.

Plus d’informations sur ce livre.

Murdo d’Alex Cousseau & Éva Offredo aux éditions du Seuil jeunesse :

Murdo est un yéti imaginaire listant et décrivant ses rêves impossibles. Par une sorte de mise en abîme de sa condition de personnage de livre, son premier rêve, et celui qui conditionne tous les autres, est d’exister en dehors des pages d’un livre. L’auteur utilise pour cela un jeu d’écriture poétique d’anaphore développant cinquante-neuf rêves commençant par « j’ai toujours rêvé de ». À cela s’ajoutent des jeux avec la typographie, les illustrations, les textes en eux-mêmes et la mise en page. Cela est particulièrement malin et ingénieux : la poésie du livre se niche alors également dans le visuel. Développant cette mélancolie de l’impossible avec une tendre fantaisie de l’oxymore, ce livre est aussi poétique, onirique, philosophique que parfois drôle et intriguant.

Plus d’informations sur ce livre par ici.

Ma chronique sur ce livre par là.

À lire aussi : 100 ans de Heike Faller & Valerio Vidali aux éditions du Seuil jeunesse & du sous-sol ; L’échappée de Mari Kanstad Johnsen aux éditions Cambourakis ; Nos Vacances de Blexbolex aux éditions Albin Michel jeunesse.

Vers l’album pour adultes ?

Des albums, il y en a pour tous les âges, au-delà des préjugés liant l’album aux enfants qui ne lisent pas encore seuls : alors pourquoi pas pour les adultes aussi ? À préciser bien sûr qu’un adulte peut trouver son compte dans un album visant a priori les enfants ; il n’en aura alors seulement pas forcément la même lecture. Si la forme de l’album est surtout dans le lien entre texte et illustrations formant une narration, l’album spécifiquement pour adultes est tout-à-fait possible même s’il n’est pas habituel. On remarque pourtant un glissement dans ce sens avec des romans parfois plus illustrés ou des bandes dessinées à la séquentialisation ou au gaufrier moins systématiques. En tout cas, moi qui aime beaucoup l’album, je milite pour !


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